ProPublica : un frère américain de MediaPart ?

24/12/2007Par

Pendant que nous commencions avec quelques confrères à mettre sur pied le projet MediaPart, un groupe de journalistes américains se réunissait à New York. Pour dresser un constat et formuler des envies professionnelles étonnamment proches des nôtres.  

Leur projet s’appelle désormais ProPublica, « un journalisme d’intérêt général », disent-ils. Ce nouveau site d’information doit sortir au premier trimestre 2008. Comme le notre. Il sera porté par une équipe de vingt-cinq à trente journalistes. Comme l’est le projet Mediapart. Et il a un objectif prioritaire : faire du journalisme d’investigation –ce mot ne fait pas peur outre-Atlantique - ; remettre sur le devant de la scène ce qui doit être le cœur de notre métier, la recherche d’informations, l’enquête.

Nous ne connaissions pas nos collègues américains. Et en découvrant leur projet, nous découvrons aussi les mêmes préoccupations et des réponses éditoriales très semblables. La baisse de diffusion des grands quotidiens américains, l’évasion de la publicité vers Internet, l’explosion de sites web d’information ont plongé bon nombre de rédactions de la presse papier dans des crises graves. Réductions d’effectifs, plans sociaux à répétition, baisse drastique des moyens consacrés au reportage et à l’enquête, perte de confiance des lecteurs : les ingrédients ne diffèrent guère, même si la presse américaine peut encore s’appuyer des groupes multimédias puissants.

 

Joint par téléphone, Richard Tofel, directeur général de ProPublica, se dit convaincu « qu’il existe une demande non satisfaite pour un journalisme de grande qualité ». « L’arrivée d’Internet, la baisse des volumes publicitaires et
des profits auxquelles est confrontée la presse aujourd’hui, évincent le journalisme d’investigation des salles de rédaction, un journalisme qui est pourtant crucial pour notre métier »
, ajoute-t-il.

 

De nouveaux modèles sont à inventer, dit aujourd’hui l’équipe de ProPublica. Elle est conduite par Paul Steiger, un ancien rédacteur en chef du Wall Street Journal, vieux routier du journalisme et qui peut afficher à son tableau de chasse seize Prix Pulitzer obtenus par les reporters qu’il dirigeait. Son bras droit s’appelle Stephen Edelberg, ancien journaliste du New York Times où il créa et anima la cellule de journalisme d’investigation avant de rejoindre les rédactions de plusieurs grands quotidiens américains régionaux.

 

Le projet de ProPublica, comme celui de MediaPart, n’est pas de suivre les sites d’information déjà existants, de délivrer un flux continu et non hiérarchisé de nouvelles, de faire mine de « tout » couvrir. Il est de se concentrer sur « quelques histoires très importantes » au cœur de la vie publique.  « Nous allons travailler dur sur deux secteurs-clés, le business et le gouvernement, les deux principaux centres de pouvoir », annoncent nos confrères.

 

« Nous n’avons pas l’intention d’entrer en compétition avec d’autres supports, précise Richard Tofel. En revanche, il s’agit d’attirer l’attention de lecteurs qui sont à la recherche d’une information de qualité et pédagogique, exacte et non biaisée et qui les aident à mieux comprendre le monde et les choix qui se posent à eux en tant que consommateurs, électeurs ou citoyens. » Ici, à MediaPart, nous reprenons bien volontiers à notre compte ces explications.

 

Mais les Etats-Unis ne sont pas la France ! Et l’autre originalité du projet ProPublica est son financement. L’équipe s’est constituée en association à but non lucratif et le projet est financé par plusieurs fondations. La plus importante d’entre-elles est la Sandler Foundation, créée par le financier Herbert Sandler (le magazine Forbes estime sa fortune à 1,2 milliard de dollars). Cinq autres fondations, dont The Atlantic Philanthropies et Cleary Gottlieb, participeront au financement de ProPublica. Un budget annuel de 10 millions de dollars est d’ores et déjà programmé.

 

« Les philanthropes qui nous financent ont fait le même constat que nous, explique Richard Tofel. Pour que la presse soit libre, il faut rester vigilant. Et elle est presque toujours remise en question par ceux qui tirent profit du secret ou de l’ignorance. Cela dit, le soutien pour une presse libre aux Etats-Unis, ainsi que dans d’autres parties du monde, reste de taille. »

 

En France, les fondations ne se sont jamais mêlées d’information. Autre culture, autres pratiques. Au moment où les industriels de l’aéronautique et de l’armement (Lagardère et Dassault), des matières premières et des transports (Bolloré), du bâtiment travaux publics (Bouygues), du luxe (Bernard Arnault et François Pinault) contrôlent une bonne partie des systèmes d’information, cet exemple américain devrait faire réfléchir. Le projet MediaPart a, lui, fait le choix de s’en remettre à ses lecteurs. Vous et vous seuls, lecteurs-internautes, déciderez du succès de ce projet de site d’informations et de débats. En participant à nos échanges et en vous abonnant pour faire vivre ce qui doit devenir une maison commune.

 

FINANCEMENT
Je ne peux que constater que le financement de ProPublica est transparent.
Ce qui n'est pas le cas de MediaPart.
Dans une ITW au Monde, Edwy Plenel nous dit ne pas pouvoir dévoiler les noms des soutiens financiers au projet MediaPart autres que les abonnements, mais pouvoir seulement nous dire qu'il s'agirait de mécénat issu de sociétés de nouvelles technologies.
Nous sommes encore éloignés en France du journalisme américain, donc...
Joyeuses fêtes et longue vie à MediaPart, malgré cette ombre portée.

Chère Peneloppe,

Vous êtes mal informée, mais c'est de notre faute. Car le financement de MediaPart est transparent et a été détaillé devant la presse, le 12 décembre, par notre directrice générale Marie-Hélène Smiéjan. Mais nous attendions que les diverses augmentations de capital, qui sont en cours et seront terminées debut janvier, pour en donner le détail précis, au centime près, sur ce pré-site.

En voici d'ores et déjà les grandes lignes.
Il y a trois catégories d'actionnaires.
D'abord les fondateurs, dont les noms sont publics et les biographies détaillées ici-même à la rubrique l'équipe. Avec nos économies et nos emprunts, nous apportons un peu plus de 1,3 million d'euros.
Ensuite les partenaires, dont les deux principaux contributeurs sont en effet des entrepreneurs en nouvelles technologies (Jean-Louis Bouchard et Thierry Wilhelm), qui contribuent pour près de 1,2 million d'euros.
Enfin des amis solidaires et mobilisés, qui se regroupent dans une Société des amis présidée par Michel Broué, qui devraient contribuer pour environ 500 000 euros.

A la mi-janvier, nous devrions ainsi avoir rassemblé au minimum 3 millions d'euros, sans doute un peu plus. Nous rendrons alors public l'ensemble du dispositif capitalistique, construit pour garantir totalement l'indépendance financière de MediaPart. Mais, comme vous l'aurez compris après avoir lu la rubrique "Le Projet", nous ne sommes pas encore à l'objectif idéal que nous nous étions fixés d'un tour de table de 4 millions d'euros. Nous doublerons d'efforts – et toute aide est bienvenue ! – pour y parvenir avant le lancement du vrai site, en mars 2008.

Trois millions, quatre millions : attention, ces montants ne nous assurent pas le confort ! Ils nous permettent simplement de voir le jour, de construire une équipe crédible, d'inventer le site dont nous rêvons, de faire nos preuves et de tenir le temps de vous conviancre massivement. C'est pourquoi l'indépendance véritable, c'est-à-dire durable, de MediaPart repose d'abord sur vous, nos abonnés et adhérents. Plus vous parierez dès maintenant sur nous en vous pré-abonnant, plus nous aurons de chance de réussir notre pari professionnel et démocratique.

Monter une entreprise de presse indépendante n'est pas une petite affaire. C'est même une longue marche qui, dans notre cas, dure depuis un an. Et, dans cette aventure, nous n'avons bénéficié d'aucun financement mystérieux, d'aucun grand argentier, d'aucun relais occulte. Ne sont autour de la table que des journalistes, des partenaires et des amis qui croient au projet, à sa viabilité et à sa réussite, et qui partagent le même rêve d'une information à la fois libre et fiable.

Mais – et comment ne pas le regretter ? –, pour l'instant, nous n'avons pas croisé, en France, de financier prêt, comme dans le cas de ProPublica, à mettre d'emblée 10 millions d'euros sur la table pour réveiller le journalisme d'investigation ! Y compris dans le secteur qui les concerne directement, c'est-à-dire le domaine économique… De quoi disserter et débattre longuement sur le sens du mot "libéral" d'une rive de l'Atlantique à l'autre.

Voilà, vous savez presque tout et vous saurez le reste d'ici quelques semaines.

D'ici là, joyeux Noël !

Merci Edwy,
Pour toutes ces précisions qui éclairent la lanterne de ceux qui, comme moi, se posaient des questions .
Joyeux Noël à vous aussi, à l'équipe, et à mes "consoeurs et confrères", les lecteurs de MediaPart.

Effectivement, il est très agréable que les rédacteurs de MediaPart répondent de temps en temps et de manière détaillée aux commentaires.

A propos de ProPublica, la France ne boxe décidément pas dans la même catégorie que l'Amérique car nos millardaires, eux, préfèrent contrôler totalement l'information...

Bonnes fêtes et surtout bonne préparation pour le lancement de MediaPart.

bonsoir
je vais peut-être poser une question idiote mais tant pis :

pourquoi ne pas ouvrir le capital aux lecteurs qui deviendraient ainsi des lecteurs-associés ?

Ou tout simplement à la Bourse.

Ou au deux. Ainsi les lecteurs actionnaires pourront vendre leur action s'ils sont déçus.

Chère amie de MediaPart,

La question n'est pas du tout idiote. Nous y avons réfléchi et voici comment nous y avons répondu.

De nos propres itinéraires professionnels, nous avons gardé un souvenir mitigé de la façon dont des journaux en crise ou en création faisaient appel financièrement à des lecteurs actionnaires qu'ils transformaient ensuite en témoins impuissants de leurs mésaventures, de leurs mauvaises gestions ou de leurs folies des grandeurs.

Nous avons donc préféré associer les lecteurs de façon, nous semble-t-il, moins démagogique, plus décisive et plus variée.

D'abord, en imaginant un journal en ligne participatif, donc l'adhérent abonné ne sera pas cantonné aux seuls commentaires sur les articles des seuls journalistes, mais pourra lui-même contribuer par ses articles, ses blogs, ses réflexions et ses informations.

Ensuite, en vous demandant de vous pré-abonner et de susciter des abonnements dès maintenant, bien avant la mise en ligne de notre journal numérique. Pour nous, c'est une assurance-vie longue durée qui vaut mille fois mieux qu'un petit actionnaire grugé, désinformé et instrumenté. Vous pariez sur nous, vous nous aidez à réussir notre pari, mais vous en êtes directement bénéficiaire en tant qu'abonné. Qui plus est, vous pouvez choisir l'abonnement de soutien à 15 € qui donnera droit à des servives particuliers, en échange de votre engagement militant.

Enfin, vous pouvez devenir actionnaire au sein de la Société des Amis de MediaPart, présidée par le mathématicien Michel Broué. Les participations vont de 5000 à 50 000 €. Certains jugent ce choix financièrement élitiste et discriminant. Mais, dans notre esprit, c'est une façon d'éviter que la Société des Amis mobilise massivement des ressources plus modestes que nous préférons voir se traduire en abonnements, en adhésion et en participation. Si vous ou certains de vos proches souhaitent néanmoins contribuer au sein de la Société des Amis, c'est encore possible : il suffit de prendre contact avec nous en cliquant sur le lien prévu à cet effet, dans la colonne de droite.

Pour résumer l'esprit MediaPart sur cette question essentielle — l'argent ou le capital, bref, le nerf de la guerre pour une indépendance durable —, notre position de départ, c'est que le meilleur actionnariat des lecteurs, ce sont des abonnés fidèles, des adhérents participatifs et des lecteurs contributeurs.

Une note plus personnelle pour finir : merci d'assumer clairement votre engagement au Modem. Nous n'oublions pas que François Bayrou fut le premier à dénoncer les aberrations françaises en matière de liberté et de pluralisme de l'information.

Ces questions d'indépendance des médias intéressent fortement les jeunes internautes non-politisés, beaucoup plus qu'on ne le croît. Regardez les réactions à ce texte publié sur un site rencontres culturelles:
(en tête des votes, des lectures et des réactions)

http://www.pointscommuns.com/le-monde-commentaire-medias-65402.html

(la proposition de faire entrer le Monde en Bourse n'a choqué personne)

Le financement du New York Times est intéréssant:

Les actionnaires acceptent d'acheter des actions sans droit de vote.

Du coup, la famille fondatrice conserve le pouvoir avec seulement une petite minorité du capital. Et maintient le contrat de confiance avec les lecteurs.

Bonjour,

Je m'intéresse à votre projet, comme à toute nouvelle expérience d'information sur le net, mais je reste dubitatif (moi-aussi) sur quelques points au sujet desquels je ne vous trouve ni assez précis, ni assez clair...

Je passe sur les questions déjà posées sur votre indépendance (voir le débat, toujours ouvert, sur votre proximité avec l'équipe de campagne de Ségolène Royal, largement développé sur de nombreux blogs: chouingmedia : http://www.chouingmedia.com/blog/20071214/mediapart_suite_et_fin_ici/ , versac : http://vanb.typepad.com/versac/2007/12/mediapart-indpe.html , notamment). Même si vos réponses ne sont toujours pas satisfaisantes à mes yeux.

Je m'interroge aussi sur la pertinence de votre modèle économique (lire ecosphere : http://ecosphere.wordpress.com/2007/12/03/mediapart-plenel-adhesion-part... , notamment). Vous pourriez répondre que ça vous regarde, sauf que vous me demandez de payer, et même assez cher, pour un produit aux contours pour le moins flous pour le moment... Vous ne pouvez attendre en effet d'un lectorat avide de presse de qualité... qu'il ne soit pas un lecteur de qualité, un lecteur qui souhaite savoir ce qu'il achète avant de payer !

Je suis troublé par votre manière de vous poser surtout en vous opposant à vos confrères de la presse mainstream, dont vous étiez vous-mêmes (pour la plupart d'entre vous) il n'y a pas si longtemps (voir Gueule de loup : http://www.gueuledeloup.com/2007/12/04/mediapart-juge-vereux-et-partie-r... , par exemple). Ce créneau d'une presse anti-presse est pourtant déjà largement occupé par Agoravox ou Rue89, notamment.

Tous ces débats se rejoignent, à mon sens, dans la question de la valeur ajoutée que vous souhaitez apporter à l'information sur le net.

J'ai le sentiment que vous nous parlez surtout d'une valeur ajoutée que vous souhaitez apporter par rapport à la presse mainstream que vous quittez ; et vous insistez avant tout sur l'indépendance économique vis à vis des grands groupes qui "tiennent" la presse mainstream.

Il s'agit d'une valeur ajoutée vis à vis du papier et de la télé, donc.

Qu'en est-il de la valeur ajoutée que vous entendez proposer vis à vis de l'information déjà disponible sur le net ?

Quelle est, par exemple, votre position, sur la critique fondamentale posée par internet vis à vis des journalistes : pourquoi passer par un intermédiaire généraliste (=le journaliste), sur tel ou tel sujet, quand l'expert en son domaine s'exprime directement sur son blog et me propose sur tous les sujets un dialogue direct avec lui d'une qualité que le journaliste ne saura jamais m'offrir ?

Quelle valeur ajoutée représente aujourd'hui pour moi la sélection et la hiérarchie de l'information effectuée par le journaliste, quand internet me propose des outils pour l'effectuer moi-même, avec des filtres dont je définis moi-même les paramètres ?

Qu'apporte votre projet de privilégier l'enquête et l'investigation, alors que je redoute que vos moyens matériels ne soient pas vraiment à la hauteur de la tâche (quelques dizaines de journalistes chez vous, contre plusieurs centaines pour les "grands" médias) ? Alors que l'enjeu me semble plutôt être celui de la documentation, de la mise en perspective et en contexte de l'information, en relation directe avec les très puissantes bases de données accessibles sur le net, ce pourquoi des documentalistes spécialisés dans le web et des outils de recherche bien maîtrisés me semblent plus pertinents que des journalistes généralistes issus du papier...

Quid de la présentation multimédia de l'information dans votre projet ? Vous ne nous parlez pas plus de travail du son, de la vidéo, de l'infographie animée, que vous ne nous parlez des documentalistes ?

Vous parlez pourtant d'une information de meilleure qualité que sur le papier et à la télévision. A part la posture morale que vous affichez, que nous proposez vous d'autre, de nouveau, de meilleur, que nous ne trouvons pas déjà sur les blogs, avec Googgle, sur Youtube ou grâce à facebook, et nos agrégateurs de flux de toutes sortes, et dans les interactions et le dialogue que nous savons déjà tisser entre toutes ces sources et ces outils ?

Ne voyez dans ma réaction qu'une interrogation, et non une attaque. Contrairement au papier, les lecteurs/auditeurs/spectateurs/commentateurs/contributeurs que vous rencontrerez sur internet, s'ils ne sont pas - par principe - un auditoire de meilleure qualité que sur le papier (souvent, ce sont les mêmes ;-) ), au moins disposent-ils ici d'une capacité très renforcée de vous interpeller, et ils ont pris l'habitude sur le net d'en abuser ;-)

Tout ça pour dire que je n'ai rien contre vous suivre dans votre projet (malgré son prix d'abonnement très élevé), mais il va vous falloir me donner bien plus de gages que vous n'en avez donné jusqu'à maintenant...

PS: quelle marche à suivre pour insérer des liens dans vos commentaires sans laisser visible l'adresse complète ? Je ne trouve pas d'indication... :-(

Allo, allo. Ici la Terre. Aucun signe de vie depuis 24 h. Quelqu'un en ligne ?

Bonjour Narvic,

Bien sûr, il y a quelqu'un!

Sur le premier point, le mail de Ségolène Royal, à propos duquel l'équipe de MediaPart a déjà beaucoup répondu, vous trouverez des pistes ici (et ailleurs, notamment sur certains blogs que vous citez):
* http://www.mediapart.fr/atelier-journal/article/14122007/segolene-royal-...

Sur ce que vous semblez prendre pour une contradiction entre pertinence du modèle économique et qualité de l'information, c'est bien l'inverse. MediaPart veut et va se donner les moyens de produire une information autre, de qualité, qui ne soit ni sur la toile ni dans la presse écrite ou audiovisuelle. Pistes:
* http://www.mediapart.fr/atelier-journal/article/oui-nous-vous-demandons-...
* http://www.mediapart.fr/presse-en-debat/pouvoir-et-independance/le-prix-...

Ensuite, vous vous dites «troublé par [notre] manière de [nous] poser surtout en [nous] opposant à [nos] confrères de la presse mainstream». Cher Narvic, sachez qu'il y a déjà assez de monde à MediaPart pour qu'il y ait, je crois, assez de différences sur cette question. Mais il y a je pense un constat commun, en effet, sur la «presse mainstream», pour reprendre votre (belle) expression: elle a perdu dans son ensemble de son souffle (euphémisme). Mille raisons à ça. Et d'une certaine manière, vous avez raison, les plus capés de l'équipe peuvent parler d'expérience. Beaucoup de membres de l'équipe ont quitté ou vont quitter leurs journaux respectifs (ou leur télé, ou leur radio, qu'importe) pour venir ici. Ce choix est un signe qui, je l'espère, dissipera vos troubles. C'est un acte, pas une intention.

Je continue: «Qu'en est-il de la valeur ajoutée que vous entendez proposer vis à vis de l'information déjà disponible sur le net ?Quelle est, par exemple, votre position, sur la critique fondamentale posée par internet vis à vis des journalistes : pourquoi passer par un intermédiaire généraliste (=le journaliste), sur tel ou tel sujet, quand l'expert en son domaine s'exprime directement sur son blog et me propose sur tous les sujets un dialogue direct avec lui d'une qualité que le journaliste ne saura jamais m'offrir ?». Là encore, pas de contradiction dans notre démarche. Si un blogeur expert connu de vos signets est intéressant, alors, n'hésitez pas à nous le faire savoir. Et, à notre tour, nous le ferons savoir aux autres adhérents de MediaPart. Une large part de notre travail (comment dire... de notre «valeur ajoutée») sera justement ce travail de veille. Il ne s'agit pas de remplacer quiconque ou de nous substituer à quiconque. Mais, bien au contraire, de faire connaître des savoirs, des expériences, des pensées, des événements, au plus grand nombre. En partageant une même communauté d'esprit, d'exigence, etc.

Sur l'investigation, détrompez vous: pas besoin d'être des centaines pour en faire. Bien au contraire, l'investigation, c'est ainsi, est souvent affaire de solitude et de pugnacité (et de... contacts). Le pari de MediaPart va à l'inverse de la logique actuelle qui prévaut (chez les «média mainstream» comme sur les grands sites d'information), celle de l'exhaustivité, pour privilégier une couverture choisie, pensée, ciblée, précise.

Sur l'écriture multimedia, cher Narvic, vous avez un allié ici même ,-) Et vous avez raison: jusqu'ici, MediaPart n'en a pas dit grand chose. Toutes les idées/suggestions/propositions/envies sont les bienvenues. N'hésitez pas. Si vous avez des sites/liens à proposer, allez y. D'avance, merci. Sincèrement.

Enfin, votre dernière remarque: «Que nous proposez vous d'autre, de nouveau, de meilleur, que nous ne trouvons pas déjà sur les blogs, avec Googgle, sur Youtube ou grâce à facebook, et nos agrégateurs de flux de toutes sortes, et dans les interactions et le dialogue que nous savons déjà tisser entre toutes ces sources et ces outils ?». Hé bien, je vous dirai que nous serons alors une source supplémentaire pour votre Google Reader, votre YouTube, votre Del.icio.us ou votre Netvibes, que sais-je encore? Vous le savez bien, tous les services que vous citez seraient des coquilles vides sans la contribution des internautes... et des sources d'information.

Au plaisir de vous lire.

Merci de votre réponse argumentée "DavDuf" ;-)

Je ne manquerai pas de vous écrire... et de (continuer à) vous lire... Au moins dans la partie publique de Mediapart dans un premier temps, car je ne suis toujours pas convaincu de m'abonner avant que vous ne commenciez... 9 euros par mois, ça me semble vraiment cher pour "une source supplémentaire"...

Vous jouez sur les mots, cher Narvic. Il va sans dire que nous espérons faire de MediaPart bien plus qu'une source supplémentaire d'information!

En vous répondant de la sorte, je voulais juste vous signifier que Google, YouTube, FaceBook, Netvibes, etc., ne sont rien sans... les sources d'information! Donc, de fait, MediaPart apportera sa part à l'édifice. Toute la question est de savoir comment s'imbriquer, contenus et contenants. En somme, comment produire et reproduire de l'information, en rompant avec les logiques actuelles du déversoir continu.

A bientôt.

Gageons que ce projet marche à la hauteur de vos (nos) espérances. Bon vent donc. Tiens, un truc sympa pour terminer l'année, le lancement du blog de Madame Danielle Mitterrand. Un peu d'air... http://danielle-mitterrand.blog.lemonde.fr/2007/12/23/%c2%ab-le-presiden...

Thierry W est editeur des messageries roses en France, Sites Internet GAYS et la Gay Pride. Son argent fait dans le minitel des homos rose ne vous dérange pas, et ne pourrait pas porter ombre à vos fiancements ?

Cher Nemoson,

Il y a en Norvège un fonds public qui gère les recettes issues de l'exploitation de l'or noir par ce petit royaume de 4,7 millions d'habitants qui n'en est pas moins au cinquième rang parmi les exportateurs de pétrole brut de notre planète. C'est un fonds éthique (vous pouvez le visiter à l'adresse www.etikkradet.no). Ce qui signifie qu'il ne place pas n'importe où ses 250 milliards d'euros. Ce fonds, l'un des mieux dotés du monde, est donc l'un des plus moraux. Or savez-vous que, parmi les entreprises européennes inscrites sur sa liste noire, figurent EADS (où l'on retrouve Lagardère), Thales (ex-Thomson) et Safran (ex-Snecma + Sagem), les deux premières pour leur implication dans la production d'armes à fragmentation, la troisième pour la fabrication de composants utilisés dans l'armement nucléaire ?

Je viens de glaner ces informations édifiantes en lisant la dernière livraison de "Terra Economica" (www.terra-economica.info), une publication amie qui, sur le papier et sur la Toile, s'efforce d'informer sur tous les enjeux économiques, sociaux et politiques que recouvre la question du développement durable. Or l'un des associés, via sa société Doxa SAS, qui permet à cette publication indépendante et pertinente de s'installer durablement n'est autre que Thierry Wilhelm. Le même qui, aujourd'hui, est fidèlement présent autour du berceau de MediaPart.

Ce détour pour vous inviter, en matière de valeurs, à garder la mesure. Je ne crois pas que les entreprises de Thierry Wilhelm, qui sont bien plus variées que votre description (notamment sur la Toile), seraient sur la liste noire de nos vigilants investisseurs norvégiens. Bien au contraire. En revanche, des entreprises qui sont au cœur du capitalisme français et, pour au moins l'une d'entre elles, via son capital et ses dirigeants, au cœur de notre système médiatique ont droit à cette opprobre nordique. N'est-il pas plus urgent de s'intéresser à elles ?

Non seulement les engagements de Thierry Wilhelm ne nous gènent aucunement, mais de plus ils sont fortement compatibles avec les principes de démocratie, de pluralisme et d'indépendance dont MediaPart se réclame. Thierry Wilhelm a horreur de la discrimination, de l'uniformité, du racisme. Il le prouve par les diverses causes qu'il accompagne, dont MediaPart, tout comme il a longtemps accompagné la liberté de l'hebdomadaire "Politis".

Enfin, je ne vois pas en quoi la défense des homosexuels, de leur dignité et de leur liberté contre le poids des préjugés et l'ancienneté des persécutions, pourrait être une ombre sur notre projet. J'espère bien, au contraire, que MediaPart saura, là aussi, faire œuvre utile.

Edwy
Merci de votre réponse claire. A ce propos n'avions nous pas en France une certaine Nicole Notat qui était censée s'occuper de notation étique, et dont nous n'entendons plus beaucoup parler depuis que de très gros indsutriels sont à son capital. Mais c'est une autre question .. Passez de bonnes fêtes et à bientôt sur Mediapart.

Abonné de longue date au Monde , mais également viré fréquemment de celui-ci pour réflexions iconoclastes ... je m'interroge sur la liberté d'expression de ce nouveau média qui se veut de qualité .

J'espère que toutes les opinions seront recevables , même celles qui dérangent le microcosme Parisien .

J'en doute , mais sait-on jamais ... tout change y compris les médias qui finissent par comprendre que , peut-être, il y a aussi des lecteurs qui ne sont pas parfaitement formatés comme ils le souhaiteraient .

Bon pour un essai donc ...

antitox
Je suis tout à fait d'accord avec toi, mais sous controle d'égarement, ce qui est plutôt difficile, je ne passe jamais sur le Nouvel observateur, pourtant, je ne suis pas ni injurier, ni trop excessif, je dis ce que je pense avec force.