Des dérives de la participation, par Emmanuelle Caminade

MediaPart, se définissant comme un média participatif, ouvre largement
ses pages aux commentaires de ses abonnés.

Une première sélection par l'argent (MediaPart étant un média payant) et par la culture (la lecture des articles nécessitant de dépasser le stade de l'analphabétisme primaire) met dès le départ ce site à l'abri des dérives les plus grave constatées sur Internet. Peu de risques de voir fleurir des critiques ordurières ou des commentaires dont les auteurs, faute d'une maîtrise suffisante de la langue n'arrivent pas plus à comprendre ce qu'ils lisent qu'à communiquer ce qu'ils pensent. De plus, fort sagement, MediaPart s'est doté d'une Charte de participation dont les principes (apport d'éléments nouveaux pour enrichir le débat, respect des autres participants...) doivent garantir un débat de qualité. Néanmoins, cette modération qui est effectuée de préférence à posteriori (à priori pour les sujets sensibles) ne semble pas toujours mettre Mediapart à l'abri d'une certaine médiocrité des commentaires, peu compatible avec l'ambition affichée par ses créateurs.

Le premier travers constaté est celui de la paresse.

Je ne crois pas " à l'égalité de tous devant les idées", comme le dit Si joliment Elisabeth Lévy dans le manifeste de son salon de réflexions "Causeur", mais les commentateurs devraient tous s'astreindre à quelques efforts, par respect pour le lecteur, si ce n'est pour eux-mêmes. On voit encore trop de brefs commentaires d'une phrase ou deux, du style "Bravo, je suis tout à fait d'accord", sans souci de la moindre justification. Autant se taire ! Le seul objectif de ces abonnés serait-il de s'adonner au plaisir de se voir publier, tel un badaud filmé en arrière-plan tente d'entrer dans le champ de la caméra avec l'espoir d'être "vu à la télé" ? Il est pourtant facile d'apporter un élément, même modeste, au débat: une critique argumentée, une expérience personnelle confirmant ou infirmant un propos, une référence à un article, à un livre ... en rapport avec le sujet.

La deuxième dérive, beaucoup plus répandue sur le pré-site de
MediaPart, pourrait être qualifiée d’”égocentrisme aristocratique".

De nombreux commentaires sont le fait d'initiés qui ne daignent pas expliciter suffisamment les éléments auxquels ils font référence, interdisant par là-même l'accès au débat aux lecteurs non informés.Ce type de commentaires débouche en général sur une conversation en aparté de quelques abonnés qui, visiblement, se connaissent bien.Ces commentateurs monopolisent alors la tribune à leur seul profit et contraignent les exclus à déserter le débat, voire à remettre en cause leur abonnement.

Comment remédier à ces problèmes ?

Premièrement, il faudrait préciser la Charte de participation , élargir les notions d'apport au débat et de respect des participants. En second lieu, on pourrait rappeler ces principes essentiels juste avant l'espace prévu pour envoyer son commentaire car je ne suis pas sûre que chacun fasse la démarche d'aller rechercher la Charte sur le site pour en prendre connaissance avant de rédiger son commentaire. Si cela ne s'avérait pas suffisant il faudrait envisager une modération à priori et non plus à posteriori. Évidemment, cela nécessiterait des moyens supplémentaires en personnel afin que la réactivité des commentaires ne soit pas trop altérée.

Quoi qu'il en soit, l'important est que les commentaires, comme les articles, soient à la mesure des ambitions des journalistes et des espoirs de la plupart des abonnés qui se sont engagés dans l'aventure de MédiaPart.

Pour des raisons techniques, ce commentaire a dû être ajouté à la main. Il date du 12 mars 2008, 17h25. Et il est signé: Pierre

Mmmh, alors celle là, elle est bien bonne.

Vous voudriez des commentaires qui :
- apportent des éléments nouveaux (des informations, quoi),
- soient bien écrits,
- n'excluent pas leur audience dans les choix des termes...

Ajoutez que les informations qu'ils contiennent doivent être vérifiées et vous obtenez... des articles !

Plutôt que de parler des "dérives de la participation", parlons des "limites de la participation". On ne peut pas deman12 marsder aux gens de tous écrire comme des intellectuels, des experts, des journalistes ou d'autres professions habituées avec l'écrit. Être à l'aise avec la plume est un avantage sur l'Internet, certes, mais ne pas l'être ne doit pas être un handicap. Faute de quoi, vous courrez le risque de réduire un "média participatif" à un "club d'intellectuels" (un peu comme causeur.fr justement).

La question de la qualité des interventions mérite d'être posée, c'est un vaste sujet dont les contours sont encore loin d'être définis et qui est centrale pour les médias participatifs en devenir comme le vôtre.

Mais ne vous leurrez pas ! Vous n'aurez pas en majorité sous vos articles des analyses fines, des contre-pieds imprévus, des contre-arguments ou que sais-je... Vous aurez des "tout à fait d'accord avec vous" et contrairement à vous, je pense que ces contributions sont utiles. Exprimer son accord est en soi un geste signifiant, un geste permis par l'Internet seulement et un privilège de vos abonnés.

Pour être à l'heure actuelle au coeur de ces questions, je puis vous assurer qu'une bonne part de mes efforts consiste à m'assurer qu'une partie de la population (du sujet), dont la relation avec l'écrit est au mieux distante pour ne dire que ça, puisse tout de même s'impliquer dans un média participatif. C'est du boulot, mais ça vaut le coup (mais c'est pas gagné je l'avoue).

Donc, ne soufflez pas sur la flamme vacillante de la participation. Mais au contraire, permettez (je vais poursuivre la métaphore, tiens) qu'elle se transforme en âtre chaleureux, en attisant intelligemment.

Je vous rappelle que vous avez fait le choix de ne pas publier de commentaires anonymes et que les auteurs sont liés à leur abonnement, donc à leur réelle identité. Les études sur le sujet montrent qu'il s'agit là d'un gage fort de qualité.

cf. réponse à Narvic, 12/03/2008 22:04

C’est vrai, je me suis fais prendre… j’ai donné une réponse d’un seul mot : Oup’s

Mais voyez-vous ce mot répond à d’autres interventions d’une personne, très clairement, plus cultivée que je ne le suis moi-même…

Est-ce dire que vous cherchez à être encore plus élitistes que vous ne l’êtes déjà… Que vous cherchiez à crée un club très fermé comme par exemple les Etats qui ont osés, sans aucune gêne, crée le G7 ???

Plus haut… ; plus fort, longue sera la chute…

Est-ce la bonne manière d'engager la conversation sur internet ? Je trouve cette réaction tout bonnement déroutante, et pour tout dire un brin arrogante.

On constate déjà qu'un lecteur sur cent seulement franchit le pas (bien difficile) de commenter en ligne. Et vous n'avez rien de plus pressé que de le décourager en lui annonçant carrément d'avance que la qualité de sa production est placée sous surveillance !

Cher Narvic et cher Pierre,

Je crois qu'il y a un malentendu: l'auteur du billet dont vous parlez est une abonnée à Mediapart, pas membre de l'équipe. Elle donne son point de vue, pas celui de Mediapart en tant qu'entité - encore qu'en l'espèce, comme pour bien des sujets, la rédaction est assez diversifiée pour ne pas parler d'une seule voix ,-)

Quoiqu'il en soit, c'est la raison pour laquelle ce billet est publié dans la rubrique "Blog des adhérents" (même si l'honnêteté commande de dire qu'il a, pendant une quarantaine de minutes, était publié par erreur sous le nom de François Bonnet, bien membre, lui, de l'équipe; mais toujours signé par son véritable auteur: Emmanuelle Caminade. Un distingo technique entre celui qui signe et celui qui met en ligne).

En un sens, c'est du participatif pur, que vous appellez - et nous aussi - de vos voeux. Il arrive aussi que le participatif, et c'est bien ainsi, n'aille pas forcément dans le sens du... participatif. Ou s'en méfie. Ou s'en détache.

Que l'on soit d'accord ou pas avec le propos d'Emmanuelle Caminade, son post a un intérêt certain: il permet de débattre. Quel participatif? Dans les commentaires? Ailleurs? Sous quelle forme? A quel rythme? Avec quelle modération? A priori? A posteriori? En notant, sans noter? Etc, etc?.

Mais, du coup, le titre de vos différents articles publiés sur vos propres sites apparaissent comme quelque peu... réducteurs ,-)

Ou, disons le autrement, pas tout à fait exacts.

Ainsi:

* «Médiapart juge ses commentateurs médiocres !» (http://novovision.free.fr/spip.php?article154)
* repris par Les embruns, sous ce titre: «Participatif élitiste» : http://embruns.net/logbook/2008/03/12.html#006258.
* et aussi http://www.pierrefrance.com/onestmal/2008/la-question-de-la-participatio...

Malentendu, donc: entre ce qu'un journal publie et ce qu'il pense. Aime-t-il toutes les nouvelles qu'il livre? Assurément pas. Est-il d'accord avec tous ses interviewés? Ou les analyses qu'il publie? Parfois oui, parfois non. Idem avec les posts. Et les billets. Rien n'est plus mortifère qu'un journal/site monolithique. J'espère bien que Mediapart saura continuer à être pluraliste, y compris dans ses colonnes mêmes et dans les relations à ses lecteurs.

Tout ça pour dire que, oui, on peut débattre des commentaires. De leur pertinence. De leur qualité. Mais que c'est toujours mieux quand on est précis. D'ailleurs, jusqu'ici, vous l'étiez, précis — dans vos remarques comme dans vos critiques; sur vos sites ou ici même.

Bien à vous,
David

Dont acte, David

Corrigez donc la présentation de ce commentaire. L'auteur n'y était nulle part présenté comme une commentatrice avant votre précision, et il me semble bien lire, encore à l'instant, à coté de la date, la signature "Médiapart", qui me semblait engager la rédaction dans son ensemble. Ou alors je ne comprends plus très bien comment fonctionne ce site...

Je fais état de votre mise au point sur mon blog.

Bien à vous,
narvic

PS: Et la rédaction de Mediapart n'estime pas utile, en publiant ce commentaire, d'indiquer en même temps quelle est sa propre position, vis à vis de cet avis que je continue à juger fort contestable ?

Mise à jour(1h35) : David, je viens de comprendre votre mention du "blog des adhérents" et la source du malentendu. Constatez que cette mention ne figure à aucun endroit sur cette page (donc aucune mention ici qu'il s'agit d'un commentaire et pas d'un article de la rédaction !). Cette mention n'est lisible que par les lecteurs qui viennent ici depuis votre page d'accueil, ce qui n'est pas mon cas, et ce qui n'est probablement pas le cas de la plupart des lecteurs qui arrivent ici ;-)

Joies d'internet... et bien des choses à réapprendre du métier pour les journalistes venant du papier : sur internet, la "Une" compte pour du beurre... 80% du trafic des sites d'information arrive directement dans la profondeur du site sans passer par la une. Il faut s'y faire et s'y adapter. Donc rajoutez sur cette page les mentions qui manquent !

Cher Narvic,

Je le concède: la navigation de ce pré-site n'était pas, toujours, idéale. Ce malentendu en est l'illustration. Et ce n'est pas forcément, comme vous le sous-entendez, un problème de culture de "journalistes de la presse écrite". Les choses devraient être bien plus claires dès dimanche, avec la sortie du site définitif. Pour votre information, il existe trois et non deux manières d'arriver sur cette page. L'une directement, et qui n'indique pas, vous avez raison, qu'il s'agit d'une contribution extérieure. Et les deux autres, qui l'indiquent: sur la page d'acceuil et via http://www.mediapart.fr/blog/

Néanmoins, il est possible, sans révéler trop de secrets, que Mediapart version finale tente de réintroduire la notion de manchette et de Une dans le registre de l'information indépendante sur le Net. Car, vous qui vous intéressez de près, et de bien, au journalisme; vous savez que ce métier est avant tout affaire de choix. Et que les Unes, dans le genre choix, on ne fait guère mieux ,-)

Il me semble, et je me répète, pardon, que si l'aventure Mediapart est belle à tenter, c'est bien ici: dans la croisée des deux cultures. Culture Papier et culture web.

Pour le reste, je vous le dis: le débat, plus général, sur les commentaires reste ouvert. Cette contribution en est une amorce.

Bien à vous.

Pour moi, Emmanuelle Caminade et toute cette catégorie d'anciens lecteurs assidus du Monde et autres revues littéraires etc,
ces "perfectionnistes de l'orthographe" devenus internautes,
ont toute leur place ici, et personnellement, je suis bien content de les avoir.

Si Mediapart a l'ambition d'apporter quelque-chose de différent, qui le rendra incontournable, cela comprendra certainement ce côté désuet du "vrai talent qui ne triche pas", de la maîtrise de la langue d'où découle la maîtrise de la pensée.

Les bonnes manières du Net (la "nétiquette"), cela s'apprend sur le tas, tout simplement parce qu'on y est et qu'on ne peut faire autrement que s'adapter.
C'est ce que feront les anciens de l'équipe, grands journalistes, immense réservoir de professionnalisme authentique, qui se jettent aujourd'hui dans un univers tout nouveau où ils en sont encore aux erreurs de jeunesse.

Les nouveaux lecteurs, parmi lesquels beaucoup, c'est vrai, ne maîtrisent pas l'orthographe, sont des "enfants du Net" qui, eux, connaissent par coeur et respectent les bons usages du Net, où l'orthographe n'est pas si prioritaire mais où d'autres critères amèneraient bien des troubles s'ils étaient ignorés.

Bref, nous avons besoin de tout le monde.
Chacun, avec ses propres atouts, est en mesure d'apporter sa pierre, régulièrement et quotidiennement, à cette belle aventure qu'est Mediapart.

Le plus dur va être de trouver un équilibre entre les deux et de ne pas faire s'opposer frontalement les deux catégories de contributeurs que vous désignez Axel_j. Expliquer sans stigmatiser, tenter d'élever le débat et de le continuer de manière constructive sans tenir une rigueur absolue à la forme sera salutaire.
Quant au fond, je suis moi-même plutôt partisant de commentaires riches et argumentés que de l'inverse mais il faut laisser au public le temps de s'impregner du style et des usages du site. Selon moi les commentaire du style "Je suis tout à fait d'accord" que l'on peut voir sont les prémices de futurs commentaires construits si la communauté et la rédaction incitent intelligemment à argumenter.
A. B.

Ah, flûte, on avait là un bon sujet de polémique si ça avait été l'opinion du rédac'chef, zut. :-P

Donc je modifie de ce pas mon post sur "On est Mal". Cependant, mes remarques sur la participation des gens, et sur les nécessaires efforts des journalistes des médias participatifs pour les recueillir, demeurent d'actualité.

Et salut à toute l'équipe et aux contributeurs !

@ Pierre:

mes remarques sur la participation des gens, et sur les nécessaires efforts des journalistes des médias participatifs pour les recueillir, demeurent d'actualité.

Bien sûr, Pierre. Nous sommes tous d'accord sur ce point. Et ce participatif là a ceci de passionnant qu'il est mouvant, instable, et qu'on ne sait pas, encore, sur quoi et comment il va déboucher.

Mais au moins, on va le tenter.

Et tenez nous au courant quand vous aurez modifié votre post ;-)

Quoi qu'il en soit c'est bien la rédaction de Mediapart qui choisi les articles publiés sur le blog des adhérents ?

A moins de 4 jours du lancement officiel, cet article n'a-t-il pas pour objet simplement de créer de l'agitation et de faire du buzz ?

[La france en péril - [Mediapart] Site en lancement cherche désespérément à faire du buzz autour de son nom !]

En règle générale, un journal est, en effet, un bien public, qui s'inscrit dans un espace public, et qui cherche à débattre publiquement. Appelez ça du "buzz" si vous le souhaitez, mais disons que ce ressort là, qui date des premières gazettes, n'a pas attendu le concept de "buzz" pour exister ,-)

Désolé, mais vous n'y êtes pas. Je vous le redis: on peut publier un article, un billet, aller voir tel ou tel individu, l'interroger, sans en épouser forcément les idées, mais bien parce qu'on peut considérer que les publier peut apporter des éléments de réflexion.

Mieux que ça: on peut publier, et c'est le cas le plus fréquent, un article qui ne mette pas tout le monde d'accord au sein d'une rédaction. La question n'est pas l'unanimité mais bien la pertinence.

Dans votre article, je lis: «La rédaction de Mediapart se décharge de toute responsabilité, au motif que l’article a été publié sur le “Blog des adhérents”». Mais où avez vous vu ceci? La rédaction de Mediapart ne se décharge de rien du tout. Je me suis simplement contenté d'expliquer que le point de vue exprimé par notre abonnée venait d'elle, et non de je ne sais quelle Pensée Unique De La rédaction De Médiapart, que certains voulaient mettre en avant.

Tenez, je vous le dis: Tandis que certains, au sein de la rédac, partagent ce qui est exprimé dans ce billet d'Emmanuelle Caminade, ce n'est pas mon cas. Il n'empêche que je trouve intéressant qu'il soit ici, dans nos pages. Pour une raison simple: il ouvre le débat et pose quelques questions sur les relations que Mediapart devra avoir avec ses lecteurs. Ce qui répond à votre question: oui, c'est bien la rédac qui, pour l'instant, valide ou non la publication des billets dans le «blog des adhérents».

Si buzz, il y a. Il est donc involontaire. Depuis hier, j'essaye justement de bien dire que la question posée ici est celle de la place des commentaires, du participatif, etc.

Bien à vous

@ David Dufresne.

Au temps pour moi de m'être mal fait comprendre. Je souhaitais mettre en lumière une technique bien à la mode de créer la polémique pour faire parler de soi, d'une part. Et d'autre part je souhaitais exprimer mon avis sur le fond, qu'un commentaire quelqu'il soit est toujours moins médiocre qu'un non-commentaire puisqu'il souligne l'intérêt du lecteur lambda pour l'article, et qu'il participe à désigner la popularité de l'article.

Cependant, il me semble pertinent de s'interroger sur la qualité des interventions et le débat qui en découle est fort intéressant. Si de prime abord j'ai été froissé par le ton pris dans cet article, j'ai été convaincu par les précisions apportées par le débat au fil des commentaires.

Etant également attentive à la qualité de la langue, j'ai eu le plaisir de constater que certains internautes se sont excusés après avoir été "repris" par un autre internaute, et ont fait des efforts, au point même que leurs commentaires, écrits par la suite, m'ont donné l'impression que les précédents n'avaient pas été écrits par la même personne ! Des métamorphoses parfois spectaculaires qui m' ont confirmée dans l'idée que, si l'on exige la qualité - ce qui ne veut pas dire pédanterie - elle ne demande qu'à s'épanouir : c'est la sincérité de la contribution qui importe.

Bonjour,

Si l'objectif de Médiapart est une information de qualité, elle ne pourra se faire que dans un contexte de liberté.

Que nos messages soient courts, qu'ils manquent de style, qu'ils soient très fouillés ou très intellectuelles, bref vous me comprenez.. ......

La participation du plus grand nombre, sans jugement de la longueur ou de la force du texte, rendra Médiapart des plus intéressants.

Autrement un simple forum de petits copains et copines aurait fait l'affaire.

Suis-je trop court ou trop long..............je ne sais ...............mais je ferai mieux la prochaine fois comme disent les sportifs.

Belle journée.

Michel Zim

Et pour rebondir...

__________________

Extrait du titre inédit : "Des apôtres, des anges et démons" - Matthieu : chapitre 1

***

"Faut que je vous parle Monsieur. Ca prendra cinq minutes.
- Cinq minutes ? J’te crois pas Matthieu.
- D’accord ! Disons alors, une dizaine de minutes.
- C’est bon. Mais je garde un oeil sur ma montre.
- Une question m’obsède. Enfin... c’est pas vraiment une question. C’est plutôt une réflexion. Imaginez un peu... imaginez un instant : ce que vous pensez, ce que moi je pense, ce que les autres pensent, c’est quoi, au juste ? Et puis, ça vaut quoi, au fond ? Moi, par exemple : ce que je pense, c’est ce que je suis. Et ce que je suis, c’est la somme de tout ce que j‘ai vécu, de tout ce que j’ai fait et de tout ce qu‘on m’a fait faire et puis aussi, ce que j‘ai subi et fais subir. Tenez, par exemple : d’abord, vous êtes au monde car vous ne pouvez pas ne pas y être... puisque vous y êtes né un jour, dans ce monde. Vous êtes... pour être au monde et pour agir aussi.
- Oui. Et alors Matthieu ?
- Et moi, j’ai commencé à agir quand j’ai commencé de marcher, la toute première fois. J’ai donc commencé à marcher avant même de commencer à penser parce que c’est plus facile de marcher que d’expliquer tous les phénomènes physiques et mentaux qui me permettent de le faire. Alors, on peut dire que l’action précède la pensée. Elle est là cette fameuse question : celle qui m’obsède depuis des mois. Quand j’ai fait mes premiers pas, j’étais bien incapable de me l’expliquer : mes jambes, mes muscles, toute cette anatomie et puis, toutes ces histoires de connexions dans le cerveau, c’est compliqué. C’est pas simple et c’est pas rien quand on y pense. Je marche et pendant que je marche et... pour marcher, je n’ai pas besoin d’y comprendre quoi que ce soit. D’ailleurs, il vaut mieux commencer de marcher avant d’être capable de se l’expliquer car, dans le cas contraire, on commencerait à marcher mais... très, très tard : on marcherait le jour où on aurait les capacités de comprendre tous les mécanismes qui nous permettent de le faire. Et puis, pensez un instant à ceux qui n’auraient pas ces facultés. Ils feraient quoi, tous ces gens ? Ils renonceraient à marcher ? Ils seraient condamnés à ramper ? Ils vivraient couchés ? Pour cette raison, on peut donc affirmer que l’action précède la pensée car, quand je marche, je ne pense pas à me l’expliquer tout simplement parce que je peux marcher sans rien y comprendre.

- D’accord, mais où veux-tu en venir Matthieu ?
- Un autre exemple, si vous permettez. Reconnaissez que c’est plus facile de trucider à l’arme blanche son voisin de palier que de chercher à expliquer tous les mécanismes qui nous permettent d’asséner les coups qui vont le tuer. Là encore, c’est bien l’action qui précède la pensée puisqu’on peut agir sur le monde sans avoir à y comprendre quoi que ce soit. Mais alors, dans ces conditions, être, c’est être inconscient. Être... comme agir, marcher, comme trucider son voisin de palier, c‘est ignorer sa propre inconscience et sa propre ignorance. Alors, prétendre comprendre qui nous sommes et qui sont les autres, c‘est présomptueux et prétentieux...
- Tu veux en venir où, au juste ?
- Toutes nos actions... comme marcher, manger, dormir, trucider son voisin, c’est bien notre ignorance et notre inconscience qui nous les dictent et non une réflexion critique et empirique. Alors, penser, c’est quoi ? Le plus souvent, penser... c’est simplement donner son opinion. Et cette opinion, elle vaut quoi quand on sait comme on le sait maintenant que nous sommes tous inconscients et ignorants ? Tandis que... penser indépendamment de ce qu’on est ; penser comme détaché de soi, de sa propre histoire et des autres, eh bien, dans ces conditions-là, et seulement dans ces conditions, penser c’est sortir enfin de l’inconscience et de l‘ignorance ; c‘est comme... sortir de soi-même pour mettre le nez dehors. Pour cette raison, ce qui doit nous intéresser chez l’autre, ce n’est pas ce qu’il pense mais c’est... ce qu’il va s’autoriser... oui, je dis bien, ce qu’il va... cet autre... s’autoriser... à penser. Dites-moi ce que vous allez vous autoriser à penser et je vous dirai si votre pensée est un raisonnement ou une simple opinion, une opinion fatalement intéressée, fatalement partisane et donc, un avis de plus parmi des milliers d’autres. Alors, maintenant, si vous voulez comprendre quoi que ce soit chez qui que ce soit, ce n’est pas de l’opinion des gens dont vous avez besoin ; ce qu’il vous faut aller chercher, c’est... ce que tous ces gens se sont... un jour, autorisés à penser une fois qu’ils ont réalisé l’urgence d’échapper à ce foutoir d’ignorance rempli de préjugés intéressés que sont les opinions.
- D’accord Matthieu. D’accord. Je vois. Mais... ça t’avance à quoi tout ça ?
- Il n’est pas question d’avancer mais de comprendre. Alors, tous ces experts, tous ces tacherons de l’analyse, tous ces chroniqueurs qui prétendent nous dire ce qu’il est important de penser sur tel ou tel sujet, tel ou tel événement, ces gens-là ne font que nous donner leur opinion et cette opinion, le plus souvent, n’a rien à voir avec la justesse d’un raisonnement juste et pertinent. On en apprend plus sur leurs préoccupations, leurs motivations, leurs peurs, leurs fantasmes, leurs préjugés et puis aussi, sur ceux qui paient leurs salaires, les intérêts qu’ils représentent, servent et cherchent à protéger et à conforter que sur le sujet qu'ils sont supposés traiter. Pour faire court...
- C’est ça Matthieu. Fais court !
- Je dirai : leur opinion nous renseigne davantage sur ce qu’ils sont. Ce que je pense et ce que nous pensons tous n’a aucune espèce d’importance même si nous sommes bien renseignés car, ce qui est important c’est ce que je vais m’autoriser à penser. Et là, penser... ce n’est plus simplement donner son opinion mais... c’est s’affranchir et c’est aussi servir, non pas ses propres intérêts mais un intérêt supérieur : celui de la justice. Penser, dans ces nouvelles conditions, c’est penser fatalement... juste... parce que... altruiste, sans mauvaise foi, sans ressentiment et loin de tout intérêt particulier. Les grands penseurs sont des penseurs désintéressés. Ils sont prêts à penser contre eux-mêmes et contre leur camp, contre leur propre histoire et contre leur propre intérêt aussi. Penser, c’est entrer en dissidence et en résistance contre soi-même et contre tous les autres.
- Dépêche-toi Matthieu ! On avait dit dix minutes.
- Alors, tout compte fait, et en comptant bien, il vaut mieux penser avec l’intelligence des autres qu’avec la sienne car le plus souvent, c’est notre intelligence qui nous empêche de penser... si par penser, on entend : "se méfier comme de la peste de ce qu’on pense... qui ne va pas plus loin que ce qu’on est." Ce qui fait, au total, pas grand monde. Reconnaissons-le !"

Copyright 2006. Serge ULESKI.Tous droits réservés

_____________________

Serge ULESKI : Peinture, littérature et actualité - auteur en quête d'un éditeur à l'adresse suivante : http://sergeuleski.blogs.nouvelobs.com

Bernard Testard
Je lis beaucoup les forums ou autres blogs……mais habituellement je ne prends pas part au débat en cours.

La question de l’apport des internautes à Médiapart m’interroge.
force est de reconnaître que les interventions sont parfois sans grand intérêt (attendez avant de réagir !) mais avant de les rejeter ne faut-il pas prendre en considération le fait qu’elles manifestent le désir de chacun de s’exprimer dans une société qui au fil des jours ne nous donne pas ou peu d’occasion de le faire.
Donner la parole à tous fait partie de la vie démocratique, mais la démocratie ne se résume sans doute pas uniquement à donner la parole.
J’attends de Médiapart en tout premier une information claire, travaillée indépendante et qui ensuite provoque le débat et donne la parole…
Ceci est un exercice difficile …..il ne suffit pas de donner la parole à cinq ou six personnes tel que le pratique un journal dit populaire du matin en région parisienne pour qu’il y ait débat.

Il me semble que ce sera la qualité de l’information que Médiapart nous apportera qui fera que nous pourrons à notre tour ouvrir un débat riche et fécond.

Je ne crois pas au bon sauvage, il faudra donc des repères - et c’est tout l’enjeu de la démocratie participative –pour employer un mot à la mode – Donner la parole à tous ceux qui souhaitent la prendre et en même temps avancer dans un débat, progresser dans la pensée ou dans l’action.
Afin d’éviter les palabres inutiles, voire agressives ou malveillantes, faudra-t-il instaurer une charte de « la médiaparticipation » ?
Sans aucun doute pas de censure mais en même temps un débat constructif demande des règles……
C’est pourquoi au risque de me répéter l’avenir repose sur la qualité de l’info qui nous sera offerte, une info diversifiée qui sortira des blablas habituels……Bernard

Bonsoir à tous,

" Je ne crois pas " à l'égalité de tous devant les idées", comme le dit Si joliment Elisabeth Lévy dans le manifeste de son salon de réflexions "Causeur", mais les commentateurs devraient tous s'astreindre à quelques efforts, par respect pour le lecteur, si ce n'est pour eux-mêmes. On voit encore trop de brefs commentaires d'une phrase ou deux, du style "Bravo, je suis tout à fait d'accord", sans souci de la moindre justification. Autant se taire ! "

Quelle arrogance. Pouvez-vous ouvrir votre esprit aux autres et dialoguer avec eux, même si vous vous pensez (notion très subjective) supérieure à eux ?
Je trouve votre style anti-démocratique : "Autant se taire ! " Censurer quiconque n'atteint pas votre niveau ? Toujours très subjectivement bien évidemment. Mais vous êtes-vous demandée un seul instant si vous ne deviez pas à votre tour vous taire, vous auto-censurer face à des lecteurs d'un niveau supérieur au vôtre ? Vaste débat. Où place-t-on la barre, la limite ? De quel droit ? Du vôtre ? De vos réflexions forcément meilleures que les autres ? Le débat très intéressant est ouvert.
Pouvez-vous aller écouter, un soir, Michel ONFRAY, philosophe, qui offre 2 heures hebdomadaires à l'université populaire de Caen ? Il fait certes partie d'une certaine élite, mais la critique volontiers, en rappelant aux auditeurs que derrière un langage élaboré (prélude aux idées et accessible à beaucoup avec de la volonté et du travail), le roi peut se retrouver facilement nu.

Bravo. Je suis d'accord avec votre commentaire, Patricia!

Ketty Méndez

Je constate, à mes dépens, qu'il est difficile de communiquer exactement sa pensée et que ma maîtrise de la langue est loin d'être parfaite. En toute humilité, je me remets donc à l'ouvrage...

Mon propos ne reflète aucunement une volonté aristocratique de réserver MediaPart à une poignée d'intellectuels et d'en interdire l'accès à ceux qui ne maîtrisent pas la langue.
Bien au contraire, il traduit un désir élitiste ( je maintiens le terme, ce n'est pas un gros mot!) de hisser l'ensemble des commentaires vers la qualité revendiquée par MediaPart qui, d'emblée, ne vous en déplaise, cherche à se positionner comme l'élite, le meilleur, du journalisme ( c'est d'ailleurs, me semble-t-il pour cela que nous l'avons rejoint).

Je fais partie en effet, et je le revendique, de l'arrière-garde qui croit que démocratiser la culture , ce n'est pas l'abaisser au niveau du peuple pour la lui rendre accessible, mais hisser le plus grand nombre vers cette culture sans la dénaturer.
Nous ne sommes pas tous égaux devant les idées. Le reconnaître, Patricia, ne signifie pas que je me pense supérieure, mais que j'accepte mes limites.Il n'y entre aucune arrogance. Suite à beaucoup d'articles, j'ai choisi de me taire me constatant incapable d'apporter un élément intéressant au débat et m'interdisant le "Bravo, tout à fait d'accord". Comme chacun d'entre nous, je sais que je suis perfectible, que je peux m'élever, c'est pourquoi je me détourne de la facilité.

C'est dans un esprit de démocratisation, au sens noble du terme, que je demande aux commentateurs savants, spécialistes d'un sujet, d'expliciter leur propos pour le rendre plus compréhensible.

L'attention que je porte à la langue qui ,non seulement véhicule notre pensée , mais aide à la formuler, à la concevoir, procède de cette même exigence de qualité.
Il ne me paraît pas méprisant de demander à chacun de faire l'effort de se relire pour corriger les fautes les plus évidentes. Même après relecture, nous laissons tous passer des fautes, moi la première, alors, quand un commentateur en corrige un autre, il ne faut pas y voir le savant qui se moque de l'ignorant, mais une vigilance, une aide mutuelle au service d'une meilleure expression de la pensée.
Prendre le temps nécessaire à la réflexion pour tenter d'apporter une contribution , même très modeste, se taire si nécessaire, ne peut que favoriser l'élévation du débat.

Certes, l'effort, le recul nécessaire à la réflexion,sont des valeurs démodées, elles sont néanmoins à la portée de tous.

Je reviens sur la polémique suscitée par ma modeste réflexion sur les dérives de la participation.

Certes, l'attribution erronée de cet article à MediaPart y entre pour beaucoup, mais je suppose que les journalistes ont été étonnés, comme moi, de l'ampleur des réactions. Malgré sa publication tardive ( je l'ai écrit il y a plusieurs semaines) je ne les soupçonne pas en effet d'avoir voulu provoquer un buzz avant le lancement du site!

Personnellement, je ne savais pas le sujet si sensible, je voulais donner matière à débattre mais ne cherchais pas à faire de la provocation. Or , je m'aperçois que mes propos ont blessé certaines personnes, ce que je regrette, et en ont exaspéré d'autres.

Visiblement ,certains, souffrant d'un complexe d'infériorité, se sont sentis agressés par mes propos et y ont réagi violemment en m'attribuant des sentiments et des pensées qui me sont étrangers. D'autres, les tenants de l'égalitarisme, et non de l'égalité, se sont indignés.

Les critiques se sont focalisées sur deux points:
- l'affirmation de l'inégalité face aux idées
- et , surtout, l'exhortation à se taire quand on n'a rien à dire.

Nous n'avons pas tous les mêmes capacités intellectuelles, ni la même culture,ni la même maîtrise de la langue, tout le monde le sait, mais cela ne se dit pas! Si j'ose l'affirmer, je le répète, c'est que cette affirmation ne préjuge en rien de la valeur des individus et que j'accepte moi-même mes limites. C'est aussi parce que je tente de les repousser.

Les égalitaristes acceptent cette réalité, mais ils pensent que tout le monde a le droit de s'exprimer, même sans avoir rien à dire. Ils se résignent donc implicitement à ces limites sans chercher à les dépasser.Contrairement à moi, ils acceptent le statu quo.

C'est progresser que de savoir se taire avec humilité , se contenter de lire pour s'enrichir, quand on ne peut rien apporter au débat, c'est progresser que de prendre le temps de la réflexion , de la formulation de sa pensée, de la correction orthographique de son texte, quand on peut intervenir sur les nombreux sujets d'ordre général qui donnent l'occasion à tous d'apporter une contribution, même modeste. Demander à tous, moi incluse, de progresser, ce n'est pas faire preuve d'arrogance.

Quant à exhorter à se taire sur un média participatif, cela semble incongru!

Si , sur un forum de discussion, un salon où la conversation se déroule à bâtons rompus, j'admets tout type de commentaires (sous réserve qu'ils ne soient ni grossiers ni insultants et qu'ils soient relus pour en supprimer les fautes les plus évidentes), de l'argumentation érudite à l'onomatopée évocatrice ( eh oui, même "oups" !), en passant par la simple approbation enthousiaste, je n'estime pas que les deux derniers aient leur place sur un site d'information.

Les égalitaristes objectent que l'intérêt premier d'un journal participatif est de donner enfin la parole à tous ceux qui en sont privés dans notre société.
Comme si notre monde médiatique ( à défaut de celui du travail) n'était pas envahi par la parole!
Les journaux télévisés sont devenus de vastes micro-trottoirs, lors des Présidentielles, les conversations entre un candidat et un panel de téléspectateurs ont remplacé les anciens débats d'idées... Dans tous les domaines, chacun est invité à donner un avis sur tout.

Pour moi, participer, ce n'est pas parler à tout bout de champ, c'est réfléchir avant de parler. Et je pense que MediaPart, tout participatif qu'il soit, est avant tout un journal d'information et de réflexion, ce qui permet le débat. Mais, peut-être n'ai-je rien compris ?

Je suis frappé que cet article ne fasse référence ni aux newsgroups usenet, ni aux techniques récentes d'automodération conçues sur le site américain slashdot au départ mais reprises en français par exemple sur Rue89:

- usenet: existant depuis la création d'internet et ouverts à tous, les newsgroups ont suscité du coup une large variété d'outils permettant de façon très flexible le filtrage ou la mise en exergue automatique, déclenché soit par l'identité d'un contributeur, soit par un sujet ou mot-clé donné, le tout pouvant concerner un post simple ou toute une enfilade à l'intérieur de l'arborescence de la discussion.
Tous outils dont on pourrait envisager l'usage ici précisément grâce à l'abonnement, et uniquement grâce à lui...
Il y a en outre une "netiquette" de la manière de poster sur usenet (qui, par exemple, condamne effectivement ces posts trop courts n'apportant rien auxquels E. C. fait allusion, mais aussi les interventions trop longues... comme l'une de celles ci-dessus qui aura certainement "asséché" la moitié des lecteurs...)

- l'automodération: avec tous ses dangers, ses détournements, ses solutions honnètes qui permettent à chacun de retrouver quand même tous les posts, elle déplace une grosse partie du travail de filtrage depuis le site vers les contributeurs, mais... ce déplacement est techniquement extrêmement efficace (et économique): il mériterait d'être lui aussi envisagé...