Aujourd'hui quand on dit quartier, on veut dire cités à problèmes et donc délinquance, violence, drogue, trafiques, ethnicisation, islamisme etc. Bref, tous les problèmes et fantasmes liés à la crise des banlieues telle qu'elle s'est exprimée en novembre 2005 . Inutile de dire que cela ne représente qu'une minorité. Inutile de dire aussi que cette minorité est un problème considérable au quotidien pour les municipalités et les habitants des dits quartiers. Inutile enfin de rappeler que les fantasmes ne sont pas la réalité mais qu'ils comptent tout autant qu'elle. La question qui se trouvait posée à la suite des événements d'il y a deux ans touchaient aux moyens financiers pour désenclaver des villes comme Clichy sous bois, des cités comme celle des Tarterêts à Corbeil ou de la grande borne à Grigny. Cela aurait compté énormément pour améliorer la situation. Surtout cela aurait répondu au mouvement civique qui s'était manifesté pour préparer le choc des élections présidentielles. Rien n'est venu ou si peu . Aux bulletins Ségolène Royal majoritairement déposés dans les urnes des "quartiers", n'ont répondu que le silence des tiroirs caisses de l'état. L'élection de M. Sarkozy a mis fin aux espérances pécuniaires des Maires et conseils généraux les plus exposés. D'un autre côté pouvait-il en être autrement? Le locataire élyséen est venu au pouvoir contre ces bandes mais grâce aussi à ces bandes. Elle mêmes se sont mobilisées contre lui et donc aussi grâce à lui. Il y une sorte de montée aux extrêmes et de mimétisme qui fait que l'un ne peut aller sans l'autre. Pour reprendre une expression de René Girard parfaitement adaptée: "le rival est le modèle du sujet". Le modèle "bling-bling" de Sarkozy est bien plus approprié aux bandes que ceux proposés par la gauche depuis la sortie de route de Bernard Tapie. Sarkozy est un "modèle obstacle" à combattre mais un puissant modèle quand même. Le fait qu'il soit maintenant au pouvoir ne fait que renforcer cette tendance. La question de l'étalage du manequinat, des grosses montres et du "pognon" est tout a fait approprié au codes des bandes. On parle en quelque sorte le même langage. Pour les élections municipales, je ne pense pas qu'il faille s'attendre à la reproduction du phénomène présidentiel de mobilisation des "jeunes" en rupture sociale. D'abord parce que très peu de forces politiques offrent une possibilité d'accès aux responsabilités municipales. Les appareils locaux sont tout aussi fortifiés que les nationaux voir plus. Difficile donc de faire émerger de futurs leaders citoyens susceptibles de transcender politiquement la violence des bandes aussi efficacement qu'un vote contre Sarkozy. Enfin, les élections locales posent la question des pouvoirs du Maire. Celui-ci est perçu par tous, délinquants et non délinquants, comme celui ou celle qui a la charge de faire "donner" les forces de l'ordre. Il n'est pas besoin de faire de dessin. Quand on est du côté des bandes on est forcément pas du côté du ou de la maire même si il ou elle est de gauche. Alors pour le vote des quartiers il faudra sans doute être équipé d'une bonne loupe pour voir frémir un peu de ce mouvement de politisation qui se manifesta en avril et mai 2007. Mais je souhaite vraiment me tromper. Michel Yvernat