MediaPart : le prix de la liberté

02/12/2007Par
Auteur: 
Edwy Plenel

Nous avons besoin d'une nouvelle presse en France, et MediaPart est ce projet. Vous en découvrirez progressivement les contours sur ce pré-site, jusqu'à la sortie, le 16 mars, du site définitif. 

Né de la rencontre entre des professionnels du journalisme et des spécialistes du Web, il cherche à inventer une réponse aux trois crises – démocratique, économique, morale – qui minent l'information en France, sa qualité et son utilité, son honnêteté et sa liberté.

Notre présidentialisme exacerbé, qui réduit la politique de tous au pouvoir d'un seul, ruine l'esprit démocratique, corrompt l'indépendance des hommes et dévitalise l'expression de la liberté. Il impose son agenda à l'information, son omniprésence aux médias et son oligarchie financière aux entreprises de presse. Dans cette culture politique-là, un(e) journaliste est forcément un adversaire qu'il faut séduire ou réduire, vaincre dans tous les cas.

Economiquement, la presse quotidienne française est entraînée dans une spirale dépressive sans fin. C'est le règne du perdant-perdant : des déficits qui se creusent, des lecteurs qui s'en vont, des recettes publicitaires qui se réduisent et des plans sociaux qui se répètent, privant les journaux de leur capital le plus précieux – l'expérience de celles et ceux qui les font. Economie et politique vont de pair : une presse fragile est une presse faible.

Tout semble fait, aujourd'hui, dans ce pays-ci, pour démoraliser le journalisme, ses valeurs, ses idéaux, sa jeunesse en somme. Certes, les résistances ne manquent pas, au sein des rédactions, dans certains hebdomadaires ou sur les sites indépendants. Mais le rapport de forces général semble d'autant plus défavorable qu'à cette crise spécifiquement française s'ajoutent les bouleversements induits par la révolution industrielle dont Internet est le symbole. Les anciens modèles économiques volent en éclats, les vieilles cultures professionnelles sont déstabilisées et le journalisme de qualité peine à trouver ses marques dans ce tourbillon.

Face à ce triple défi, le projet MediaPart se veut l'invention d'une réponse en forme d'espoir : non seulement une presse éditorialement libre et indépendante économiquement, mais surtout une presse profondément repensée et totalement refondée. Ni sous-produit numérique de la presse papier, ni média de complément des titres existants, le rêve que nous caressons est la création d'un journal en ligne, de qualité et de référence, qui se suffise et vous suffise. Désormais soumis à vos avis, commentaires et contributions sur ce pré-site, l'avenir de ce projet est entre vos mains.

Le journalisme dont nous nous réclamons s'inscrit dans une longue tradition. Son ambition est de fournir les informations d'intérêt public qui nous sont nécessaires afin de rester libres et autonomes, maîtres et acteurs de nos destins, individuel et collectif. Sa première obligation est à l'égard de la vérité, sa première loyauté envers les citoyens, sa première discipline la vérification et son premier devoir l'indépendance. Mais il ne suffit pas de revendiquer cet héritage pour lui rester fidèle. Car notre métier ne peut plus être pratiqué d'en haut, tel un argument d'autorité qui ne souffrirait pas la discussion, ni entre nous seuls, comme une histoire pour initiés qui tiendrait à distance ses lecteurs.

Avec l'avènement du média personnel, la révolution d'Internet a fait tomber de son piédestal le journalisme qui prétendait avoir le monopole de l'opinion. S'il l'avait oublié, il lui a fallu réapprendre, parfois à ses dépens, que le jugement, le point de vue, l'analyse ou le commentaire, l'analyse et l'engagement, l'expertise et la connaissance ne sont pas sa propriété exclusive. C'est une bonne nouvelle, car le voici ainsi remis à sa juste place, celle qui fonde sa légitimité démocratique : chercher, trouver, révéler, trier, hiérarchiser, transmettre les informations, les faits et les réalités, utiles à la compréhension du monde, à la réflexion qu'elle suscite et à la discussion qu'elle appelle.

En redonnant vigueur et force à ce travail d'information, d'enquête et d'explication, de terrain et de contextualisation, le projet MediaPart propose de défendre le journalisme tout en l'invitant à se remettre en cause dans un partenariat inédit avec des lecteurs contributeurs. L'univers francophone de l'information en ligne attend encore l'invention d'un site participatif de qualité et de référence, associé à un journalisme revendiquant les mêmes principes. Grâce à Internet, dire qu'une presse vraiment libre est celle de ses lecteurs fidèles peut ne plus être un vain mot, un argument démagogique ou un cliché commercial. Mais à condition d'échapper à la masse anonyme et de sortir de la foule vengeresse pour construire un public conscient et impliqué, partageant des valeurs communes et nouant une conversation démocratique.

C'est pourquoi le projet MediaPart s'avance à contre-courant de la vulgate dominante selon laquelle il n'y aurait qu'un modèle viable sur le Net, celui de l'audience et de la gratuité. D'abord, cette pensée unique repose sur un mensonge : le gratuit ne l'est pas, non seulement parce qu'il est financé par la publicité, mais surtout parce que vous ne cessez de payer, souvent trop cher, les équipements, les abonnements, bref les tuyaux qui donnent accès à ces contenus prétendument gratuits. Ensuite, elle véhicule l'illusion que tout se vaut puisque tout serait gratuit, le meilleur comme le pire, l'information pertinente comme la rumeur infondée. Enfin, dans sa course au plus grand nombre, elle tire vers le bas l'information, l'uniformise et la banalise, la malmène et la dévalorise.

Il en va ainsi de la liberté de l'information comme de sa valeur. Adhérer au projet MediaPart, c'est payer pour les garantir. C'est d'abord acheter la promesse d'une information exigeante, sans dépendance publicitaire ni courbe d'audience. C'est ensuite acquérir le droit de participer à un média totalement inédit, d'appartenir à sa communauté de lecteurs et de contributeurs, de faire vivre soi-même l'information, la réflexion et le débat. C'est enfin construire durablement l'indépendance de cette nouvelle presse, radicalement démocratique.

Il ne s'agit donc pas seulement de résister, mais aussi d'inventer. De découvrir de nouvelles terres, d'arpenter de nouveaux continents, de fonder de nouveaux modèles pour mieux sauver les traditions et les héritages qui nous tiennent à cœur. Ainsi, durant la longue marche qui nous a menés à ce projet, nous avons souvent pensé au Combat d'Albert Camus, ce quotidien issu de la Résistance et né à la Libération quand brillait l'espoir de refonder la République par un surcroît de démocratie, de solidarité et d'humanité. « Notre désir, écrivait Camus dans Combat, le 31 août 1944, d'autant plus profond qu'il était souvent muet, était de libérer les journaux de l'argent et de leur donner un ton et une vérité qui mettent le public à la hauteur de ce qu'il y a de meilleur en lui. Nous pensions alors qu'un pays vaut souvent ce que vaut sa presse. Et s'il est vrai que les journaux sont la voix d'une nation, nous étions décidés, à notre place et pour notre faible part, à élever ce pays en élevant son langage ».

D'un siècle à l'autre et d'un média à l'autre, du papier au Web, le programme reste inchangé. Je ne sais si cette référence nous portera chance, puisque Combat fait partie de ces espérances trahies dont l'histoire de la presse est encombrée. Quand, refusant de se compromettre, Albert Camus reprit sa liberté de journaliste, il eut ce mot : « Au moins, nous n'aurons pas menti ». D'ores et déjà, au seuil de cette aventure qui devient la vôtre, nous pouvons dire qu'au moins, nous n'aurons pas renoncé. Mais, demain, quand vous aurez été nombreux à relever ce pari avec nous, à croire comme l'équipe qu'il rassemble à ce projet, à son ambition et à son réalisme, nous pourrons ajouter qu'au moins, nous ne nous sommes pas trompés.

Pour le prix de deux MacDo par mois, trois MacDo pour le "tarif soutien", franchement y'a pas photo!

Simple lecteur/téléspectateur/auditeur de radio et internaute, quand je vois que pour l'instant il n'y a que 6000 abonnés "fermes", tout le reste étant des lecteurs qui "attendent de voir", je me dis bon sang, il y a quelque-chose de vraiment pourri dans le système!

Se faire arnaquer tous les jours dans des dépenses captives de malbouffe et de consommation de produits chinois qui mettent à mal notre économie,
ceci sans broncher,
mais par contre faire la fine bouche devant une initiative si rare de journalistes qui mettent franchement et ouvertement la barre très haut, qui s'engagent, qui risquent leur réputation et leurs économies, et entre parenthèses, qui représentent une certaine excellence non seulement en ethique journalistique, mais tout simplement en maîtrise de la langue française
(et ceci va loin puisque c'est là que commence la vraie liberté de penser et l'esprit critique libre)
oui, bon sang on se demande dans quelles limbes théorico-intellectuello-parisianistes sont passées les priorités vitales des "consommateurs" d'infos et de médias...

Pardon Mediapart,
ce coup de gueule n'aura certes pas le mérite de se montrer raccoleur ni avenant, mais j'avais besoin d'en faire état.

Dans le contexte politique français et européen, dans celui, mondial, de l'économie globalisée tendance "tout pour la finance déshumanisée", dans le contexte que l'on sait d'une profession journalistique détournée depuis des années de son vrai pouvoir responsable d'assurer la liberté d'information,
pour moi, il ne devrait pas y avoir d'hésitation!

Et non, ce n'est pas parce que je vais payer 9€ par mois, que je serai sans cesse à comparer avec le gratuit ou avec mes autres abonnements moins chers.
On n'est pas dans les mêmes créneaux.
Mediapart, pour moi, c'est unique.
(jusqu'à ce qu'il fasse des émules, faut-il espérer? :-))

Il y a Radio Courtoisie qui ne vit qu'avec l'argent de ses auditeurs. Jean Ferret a fait une radio indépendante des pouvoirs en place et cela s'entend.

"La question est : quel monde ? Et cette question en contient deux . Il y a une question analytique : dans quel(s) monde(s) vivons nous? Et puis il y a la question normative: dans quel monde désirons-nous vivre ? Le lien pratique entre la question analytique et la question normative donne une définition courante de la politique: une politique propose les moyens de passer du monde tel qu'il est au monde tel que nous voulons qu'il soit."

Cette citation d'Alain Badioux ( de quoi Sarkozy est-il le nom? page 71) me semble indiquer clairement l'importance de la réussite de Mediapart .

La démocratie est un combat et il faut en payer le prix.

Bonjour à tous (Edwy, Axel J et François B.) et les (6000 ?) autres

Peu à peu, l'esprit de révolte se dissout... car c'est de révolte qu'il faut parler maintenant... Mais révolte intellectuelle et idéologique sont des combats dur à mener au quotidien, quand les préoccupations matérielles le bouffent, ce quotidien... et souvent à juste titre.

Je crois que l'avenir ainsi que la sauvegarde d'une société digne de ce nom passe par une prise de conscience et une implication individuelle, au quotidien.

Mais peut on demander la même implication à un smicard de chez Peugeot, à un cadre dirigeant ou à une femme au foyer ?

Pour moi, concrètement, ça va de laisser passer la vieille dame au passage piéton, jusqu'à à militer au sein de mon entreprise pour exiger des explications sur les gels de salaires...

Qui pourrait représenter l'intérêt général ? Y a t-il seulement un intérêt général ?
Je ne crois pas ; il y a d'abord l'intérêt de chacun, de chaque groupe, malheureusement avant tout le reste. On le voit bien dans les différentes manifs : un coup les uns, un coup les autres, presque à tour de rôle.

A quand un coup TOUT LE MONDE ?? Des revendications communes, c'est pourtant pas ça qui manque !!!!!!

Modestement, j'adhère à Médiapart avec le souhait qu'il fera la différence avec les autres médias. Ce n'est pas pour autant qu'il faut dénigrer tout le reste, mais au moins aura-t-on une cyber-info dont on ne se méfiera pas...

Moi, j'y crois. J'y crois comme un "guide rassembleur", une trame de qualité dont chacun pourrait s'en dire défenseur. Défenseur d'une liberté et pas des moindres, celle de l'information, donc de la vérité. Cela reste, à mon sens la base de toute initiative volontaire désireuse de dérouiller le système.

Je vous assure , Monsieur Pleynel, d'en parler autour de moi le plus possible.

D'abord un petit mot pour soutenir votre belle initiative, pas évidente à mettre en place et à faire vivre.
Les articles sont interessants et bien écrits et les commentaires par rapport à ceux que l'on peut lire sur d'autres sites de quelques quotidiens, sont également à la "hauteur". Bon arrêtons-là.
Malgré cela, je ne m'abonnerai pas tout de suite. Pourquoi ?
- Parce que je reste attacher à la forme journal "papier", qui pour moi est encore un plaisir chaque matin ou soir.
- Le prix, reste un peu cher pour un objet "journal" que l'on ne peut prendre avec soi, pour une qualité de lecture qui n'est pas la même.

Bon, en espèrons que la lecture de Mediapart me fasse rapidement changer d'avis...

Monsieur Edwy Plenel,

Toute l'équipe de Médiapart,

Et tous les abonnés..... et lecteurs fermes.....

Internet, ce nouveau moyen de communication, doit permettre une plus grande solidarité entre les humains de bonne volonté et être un instrument de communication rapide et efficace sans frontière aucune.

Le contenu et la qualité de l'information librement disponible au plus grand nombre me semblent un objectif des plus logiques et des plus démocratiques.

Le concept de Médiapart, avec des journalistes indépendants, des écrits signés et des lecteurs partenaires financièrement est une idée des plus républicaines.

Alors sans hésitez, je vous envoie ce jour ma participation '' ferme '' et je vous souhaite tous, beaucoup d'énergie et de plaisir dans cette belle aventure.

J'ai hâte au 16 mars, pour découvrir le nouveau site de Médiapart.

Belle journée à toutes et tous.

Michel Zim